C'est l'un des éléments que met en exergue le rapport annuel de la Miviludes, la Mission de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires • Ou comment le marché de la formation professionnelle peut s'avérer périlleux •
Par Julie LASTERADE
LIBERATION.FR
Ils veulent s'initier au management et se retrouvent nus avec leurs collègues dans une piscine. Ils aimeraient se sentir plus sûrs d'eux et s'inscrivent pour un stage de «guérison du passé». Ils veulent se réorienter professionnellement pour faire du bien aux autres et choisissent une formation de «guérisseur à mains nues». Ils risquent de se retrouver entre les mains de mouvements «à caractères sectaires»....
Dans son quatrième rapport annuel rendu public mercredi, la Miviludes (Mission de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires) met l'accent sur «la formation professionnelle et le risque sectaire». Ou comment le marché de la formation professionnelle serait devenu un champ miné.
«Augmentation croissante de prestations visant au développement de la personne, de ses capacités comportementales», «prestations qui investissent de plus en plus l'intimité des personnes», «nouveaux labels, nouveaux métiers», la Miviludes s'inquiète. «Le détournement des objectifs de la formation professionnelle peut conduire notamment, par des procédés de séduction, à des actes ou des pratiques illicites», craint-elle.
La Miviludes refuse de lister les organismes et les formations «à risque». Mais elle cite tout de même la formation de «doula, une nouvelle profession [qui se] développe généralement dans les milieux hostiles à la médicalisation de la maternité» et qui «pose un certain nombre de questions» et «peut concerner des publics vulnérables».
Elle pointe également l'EMF balancing technique dont elle n'hésite pas à dénoncer «la dangerosité dans la mesure où ses applications peuvent se substituer à des traitements médicaux classique». Pas de liste, donc, «le paysage est trop mouvant», explique Françoise Chalmeau, de la Miviludes, mais des mots clefs comme «analyse transactionnelle», «rebirth», «kinésiologie» qui la font tiquer.
«Ce ne sont pas les méthodes qui sont en cause, précise Henri-Pierre Debord, mais les interprétations qui en sont faites». D'apres lui, lorsque des prestataires de services appartiennent à des mouvements caractérisés comme sectaires, c'est la «sécurité» de certaines entreprises qui serait en danger. «Des vols d'ordinateurs par exemple, avance-t-il, des risques d'ordre financier, des risques de déstabilisation des salariés, de modification de comportements ou des risques d'infiltration, comme des détournements de données et d'informations stratégiques».
Henri-Pierre Debord ajoute qu'il recoit entre 200 et 300 questions de salariés ou d'entreprises chaque années sur le risque de dérives sectaires de tel ou tel organisme. Mais rien de plus précis. Le rapport cite en exemple quelques cas d'associations ayant fait l'objet de controles ou d'enquetes. Mais les délits avérés semblent rarissimes. Néanmoins, Henri-Pierre Debord insiste, «nous sommes de plus en plus sollicités par des entreprises, des syndicats ou des salariés confrontés à des situations qu'ils ne comprennent pas». Ils lui demandent «tel organisme présente-t-il un risque sectaire ?», «Telle méthode peut-elle être en lien avec un mouvement sectaire ?», «le responsable de cette société de conseil est membre de ce mouvement, traiter avec lui représente-t-il un risque pour mon entreprise ou pour mes salariés?», rapporte-t-il.
Pour les éviter, c'est cette fois-ci la Miviludes qui se propose de jouer les prestataires de services dans les entreprises et de «sensibiliser au risque sectaire» les responsables administratifs et des ressources humaines. Il s'agit de leur apprendre à repérer «le vocabulaire obscur, le discours anti-social, explique Françoise Chalmeau. De définir un cahier des charges précis de ce que l'on attend de la prestation, de demander aux intervenant de fournir un diplome reconnus par l'éducation nationale. Méfiance aussi si les formations sont organisées le soir ou le week-end, si elles font sauter des repas et jouent sur l'épuisement physique». Et éventuellement, en cas de gros doute, de «suivre l'actualité juridique» de l'organisme de formation.
Par Julie LASTERADE
LIBERATION.FR
Ils veulent s'initier au management et se retrouvent nus avec leurs collègues dans une piscine. Ils aimeraient se sentir plus sûrs d'eux et s'inscrivent pour un stage de «guérison du passé». Ils veulent se réorienter professionnellement pour faire du bien aux autres et choisissent une formation de «guérisseur à mains nues». Ils risquent de se retrouver entre les mains de mouvements «à caractères sectaires»....
Dans son quatrième rapport annuel rendu public mercredi, la Miviludes (Mission de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires) met l'accent sur «la formation professionnelle et le risque sectaire». Ou comment le marché de la formation professionnelle serait devenu un champ miné.
«Augmentation croissante de prestations visant au développement de la personne, de ses capacités comportementales», «prestations qui investissent de plus en plus l'intimité des personnes», «nouveaux labels, nouveaux métiers», la Miviludes s'inquiète. «Le détournement des objectifs de la formation professionnelle peut conduire notamment, par des procédés de séduction, à des actes ou des pratiques illicites», craint-elle.
La Miviludes refuse de lister les organismes et les formations «à risque». Mais elle cite tout de même la formation de «doula, une nouvelle profession [qui se] développe généralement dans les milieux hostiles à la médicalisation de la maternité» et qui «pose un certain nombre de questions» et «peut concerner des publics vulnérables».
Elle pointe également l'EMF balancing technique dont elle n'hésite pas à dénoncer «la dangerosité dans la mesure où ses applications peuvent se substituer à des traitements médicaux classique». Pas de liste, donc, «le paysage est trop mouvant», explique Françoise Chalmeau, de la Miviludes, mais des mots clefs comme «analyse transactionnelle», «rebirth», «kinésiologie» qui la font tiquer.
«Ce ne sont pas les méthodes qui sont en cause, précise Henri-Pierre Debord, mais les interprétations qui en sont faites». D'apres lui, lorsque des prestataires de services appartiennent à des mouvements caractérisés comme sectaires, c'est la «sécurité» de certaines entreprises qui serait en danger. «Des vols d'ordinateurs par exemple, avance-t-il, des risques d'ordre financier, des risques de déstabilisation des salariés, de modification de comportements ou des risques d'infiltration, comme des détournements de données et d'informations stratégiques».
Henri-Pierre Debord ajoute qu'il recoit entre 200 et 300 questions de salariés ou d'entreprises chaque années sur le risque de dérives sectaires de tel ou tel organisme. Mais rien de plus précis. Le rapport cite en exemple quelques cas d'associations ayant fait l'objet de controles ou d'enquetes. Mais les délits avérés semblent rarissimes. Néanmoins, Henri-Pierre Debord insiste, «nous sommes de plus en plus sollicités par des entreprises, des syndicats ou des salariés confrontés à des situations qu'ils ne comprennent pas». Ils lui demandent «tel organisme présente-t-il un risque sectaire ?», «Telle méthode peut-elle être en lien avec un mouvement sectaire ?», «le responsable de cette société de conseil est membre de ce mouvement, traiter avec lui représente-t-il un risque pour mon entreprise ou pour mes salariés?», rapporte-t-il.
Pour les éviter, c'est cette fois-ci la Miviludes qui se propose de jouer les prestataires de services dans les entreprises et de «sensibiliser au risque sectaire» les responsables administratifs et des ressources humaines. Il s'agit de leur apprendre à repérer «le vocabulaire obscur, le discours anti-social, explique Françoise Chalmeau. De définir un cahier des charges précis de ce que l'on attend de la prestation, de demander aux intervenant de fournir un diplome reconnus par l'éducation nationale. Méfiance aussi si les formations sont organisées le soir ou le week-end, si elles font sauter des repas et jouent sur l'épuisement physique». Et éventuellement, en cas de gros doute, de «suivre l'actualité juridique» de l'organisme de formation.