06 avril 2006

La prière serait dangereuse pour la santé

Le Monde

The American Heart Journal, la bible mensuelle de la cardiologie, publie dans sa livraison d'avril une étude qui évalue le rapport bénéfice-risque de la pratique de la prière. Ce travail est signé de seize praticiens dirigés par les docteurs Herbert Benson et Patricia L. Hibberd. S'il s'agit bien ici de prière - cet acte de religion par lequel on s'adresse à Dieu pour l'implorer ou pour l'adorer -, il faut préciser qu'il s'agit de prières collectives effectuées pour le bénéfice potentiel de tierces personnes.

Les auteurs de la publication de l'American Heart Journal précisent, en introduction de leur article, qu'il s'agit là de pratiques très répandues dans certaines congrégations religieuses, mais que ces pratiques n'ont pas, jusqu'ici, fait la preuve scientifique de leur efficacité. Le temps était donc venu de faire la lumière en usant des outils méthodologiques habituellement utilisés en médecine pour établir un lien de causalité et faire la part du hasard.

Ce travail a été conduit auprès de 1 802 personnes ayant subi, entre janvier 1998 et novembre 2000, dans six établissements hospitaliers américains, un ou plusieurs pontages aorto-coronariens - intervention chirurgicale très répandue qui consiste à modifier le circuit de la vascularisation du muscle cardiaque chez des personnes exposées au risque d'infarctus du myocarde.

Trois congrégations religieuses, deux catholiques et une protestante, ont été chargées de prier pour "la réussite de l'opération chirurgicale et une guérison rapide sans complications" des malades dont elles recevaient le prénom et l'initiale du nom de famille.

Après tirage au sort, trois groupes furent constitués. Les personnes du premier et du deuxième groupe avaient été informées de ce qu'elles pourraient ou non faire l'objet de prières. En réalité, seul le deuxième groupe en aura bénéficié. Le troisième groupe fut, lui, effectivement l'objet de prières et en fut préalablement informé. Toutes ces prières ont été prononcées durant une période de quatorze jours commençant la nuit précédant l'intervention de chirurgie cardiaque.

Le premier point-clé de l'étude était la survenue ou non d'une complication médicale à 14 et à 30 jours. Le second concernait les taux d'accidents graves ou mortels. Dans les deux premiers groupes - ceux composés des personnes ne sachant pas si on priait ou non pour elles -, les auteurs de ce travail ont observé une égalité presque parfaite des conséquences de l'intervention. Des complications sont survenues chez 315 des 604 personnes du premier groupe et chez 304 des 597 du deuxième, soit des taux respectifs de 52 % et 51 %.

Quant au troisième groupe - pour lequel les prières étaient effectivement effectuées et les malades informés qu'elles l'étaient -, le taux de complications a été de 59 % (352 sur 601). La fréquence des nouveaux infarctus fut aussi supérieure (18 % contre 13 %). Quant aux taux de mortalité, ils furent les mêmes dans les trois groupes.

Les auteurs de ce travail en tirent deux conclusions. Non seulement cette forme de prière n'a pas, ici et dans cette indication, démontré la preuve de son efficacité, mais il est désormais établi qu'elle peut avoir des effets nocifs. Du moins quand les malades savent que des inconnus s'adressent à Dieu pour implorer qu'Il oeuvre à prévenir les complications d'un pontage aorto-coronarien.

Comment comprendre ? Les auteurs expliquent ce résultat, non sans un certain bon sens, par le stress subi par des patients inquiets de se savoir à ce point malades "que l'on avait dû avoir recours, les concernant, à un groupe de prière".

The New York Times précise que cette étude, qui n'était en aucune manière destinée à "déterminer si Dieu existe ou s'Il exauce ou non les prières", a coûté 2,4 millions de dollars. Une somme pour l'essentiel fournie par la Fondation religieuse John-Templeton...

Jean-Yves Nau
Article paru dans l'édition du 07.04.06


Un certain nombre d'articles tapageurs avaient fait état il y a quelques années de résultats 'positifs' de la prière intercessionnelle. iIls avaient été critiqués à l'époque pour le manque de sérieux des protocoles utilisés dans les études. Evidemment, il est difficile de croire qu'il y ait un effet quelconque, positif ou négatif d'ailleurs. L'important est que ce genre d'études inutiles soit financées par les associations religieuses et non par les contribuables, au nom de la séparation de l'Eglise et de l'Etat.

Evolution Of 'Irreducible Complexity' Explained

Using new techniques for resurrecting ancient genes, scientists have for the first time reconstructed the Darwinian evolution of an apparently "irreducibly complex" molecular system.

The research was led by Joe Thornton, assistant professor of biology at the University of Oregon's Center for Ecology and Evolutionary Biology, and will be published in the April 7 issue of SCIENCE.

How natural selection can drive the evolution of complex molecular systems -- those in which the function of each part depends on its interactions with the other parts--has been an unsolved issue in evolutionary biology. Advocates of Intelligent Design argue that such systems are "irreducibly complex" and thus incompatible with gradual evolution by natural selection.

"Our work demonstrates a fundamental error in the current challenges to Darwinism," said Thornton. "New techniques allowed us to see how ancient genes and their functions evolved hundreds of millions of years ago. We found that complexity evolved piecemeal through a process of Molecular Exploitation -- old genes, constrained by selection for entirely different functions, have been recruited by evolution to participate in new interactions and new functions."

The scientists used state-of-the-art statistical and molecular methods to unravel the evolution of an elegant example of molecular complexity -- the specific partnership of the hormone aldosterone, which regulates behavior and kidney function, along with the receptor protein that allows the body's cells to respond to the hormone. They resurrected the ancestral receptor gene -- which existed more than 450 million years ago, before the first animals with bones appeared on Earth -- and characterized its molecular functions. The experiments showed that the receptor had the capacity to be activated by aldosterone long before the hormone actually evolved.

Thornton's group then showed that the ancestral receptor also responded to a far more ancient hormone with a similar structure; this made it "preadapated" to be recruited into a new functional partnership when aldosterone later evolved. By recapitulating the evolution of the receptor's DNA sequence, the scientists showed that only two mutations were required to evolve the receptor's present-day functions in humans.

"The stepwise process we were able to reconstruct is entirely consistent with Darwinian evolution," Thornton said. "So-called irreducible complexity was just a reflection of a limited ability to see how evolution works. By reaching back to the ancestral forms of genes, we were able to show just how this crucial hormone-receptor pair evolved."

The study's other researchers include Jamie T. Bridgham, postdoctorate research associate in evolutionary biology and Sean M. Carroll, graduate research fellow in biology. The work was funded by National Science Foundation and National Institutes of Health grants and an Alfred P. Sloan Research Fellowship recently awarded to Thornton.

Editor's Note: The original news release can be found here.


La "complexité irréductible", credo des tenants du dessein intelligent, n'aura pas résisté bien longtemps aux assauts des scientifiques.

Découverte du chaînon manquant entre poissons et vertébrés à quatre pattes

PARIS (AFP) - Des fossiles mi-poissons mi-tétrapodes, découverts dans l'Arctique canadien, rétablissent un chaînon manquant dans l'évolution entre poissons et animaux capables de se mouvoir sur la terre ferme, il y a quelque 375 millions d'années, selon deux articles publiés dans Nature.
Les fossiles de Tiktaalik roseae, sorte de poisson-alligator plat doté de nageoires articulées capables de supporter un corps de plus de deux mètres de long, permettent de "documenter la séquence des changements évolutionnaires" qui a abouti aux tétrapodes, estiment les auteurs de ces articles dans la revue scientifique à paraître jeudi.

Tiktaalik a été nommé par le Conseil des Sages de Nunavut, sur le territoire desquels ont été trouvé les fossiles, a indiqué l'Université de Chicago dans un communiqué. Le mot signifie "grand poisson de basses eaux".

Jusqu'à la découverte de ces fossiles, "l'origine des principales caractéristiques des tétrapodes était restée dans l'ombre", notent Edward Daeschler (Académie des sciences naturelles, Philadelphie, USA), Neil Shubin (Université de Chicago, USA) et Farish Jenkins (Université de Harvard, Cambridge, USA).

Les tétrapodes, ces vertébrés qui aujourd'hui comprennent aussi bien les reptiles (dont les serpents) que les amphibiens, les oiseaux et les mammifères, se sont adaptés à la vie terrestre grâce à leurs deux paires de "membres marcheurs", issus des nageoires lobées des sarcoptérygiens (poissons primitifs).

Dans l'évolution, Tiktaalik vient après Panderichthys, poisson fossile connu pour son spiracle, un large évent à l'arrière de la tête qui semble ébaucher l'oreille interne des tétrapodes et vieux de plus de 380 millions d'années, et avant les premiers tétrapodes, Acanthostega et Ichthyostega, qui vivaient il y a 365 millions d'années et dont les membres étaient équipés de métacarpes.

A partir d'un squelette type, reconstitué à partir de plusieurs individus, les chercheurs ont établi que Tiktaalik présentait déjà des caractéristiques qui le distinguent nettement des sarcoptérygiens.

L'animal est de forme aplatie, ses yeux sont placés sur le même plan que le dos, son cou est mobile, ses côtes sont solidaires de l'axe du squelette et il est doté d'une ceinture scapulaire (liaison osseuse avec le sternum) ainsi que de nageoires antérieures capables d'accomplir des mouvements complexes tout en soutenant le corps.

Tiktaalik vivait au nord de ce qui était alors le continent euraméricain, dans un climat subtropical à tropical. Il évoluait dans des eaux fluviales lentes et peu profondes.

Dans cet environnement, le découplage de la tête (d'une vingtaine de centimètres de long) par rapport au reste du corps et les changements dans son mode de locomotion lui ont permis d'adapter sa façon de se nourrir, voire de respirer avec un système à mi-chemin entre les branchies et la pompe buccale, analysent les auteurs de l'article.

La découverte de Tiktaalik vient donc étayer l'hypothèse selon laquelle c'est "l'habitat en eaux peu profondes dans les plaines inondables du continent euraméricain pendant le Dévonien supérieur qui a abrité la transition entre les poissons et les tétrapodes", soulignent-ils.


Encore un succès de la théorie de l'Evolution, qui avait fait la prédiction de l'existence de ce chaînon depuis plusieurs décennies.